Interview de Ismaël Tannamda Sawadogo
Grow Learn Connect : Ismael, qu'est-ce qui vous a amené à travailler dans le secteur du développement des compétences ? Comment avez-vous commencé cette carrière ?
Ismael Tannamda Sawadogo : Le développement des compétences est une passion pour moi. J’estime que c’est un métier qui permet de partager une partie de soi-même et de recevoir beaucoup des autres. Partager ses connaissances, ses compétences et ses aptitudes, c’est construire autrui et lui permettre de posséder une part de soi. Ainsi en partageant, on ne disparait jamais complétement !
Mon parcours est assez atypique. J’ai fait mes premières armes avec la Maison de l’Entreprise du Burkina Faso, dès ma sortie de l’université avec ma Maîtrise en Gestion et Administration des Entreprises. En 2006, je fus recruté par la Maison de l’Entreprise pour un contrat de Conseiller d’entreprise par intérim, en remplacement d’une Conseillère d’entreprise en congés de maternité.
Ce premier poste professionnel m’a permis de forger mon profil de conseiller et de formateur, car assez tôt (26 ans), j’ai dû animer des formations à l’endroit d’adultes et même été attesté comme Formateur en gestion d’entreprise selon la méthodologie GERME en 2008.
Juste avant cela, j’offrais déjà des services d’assistance aux petites et moyennes entreprises et l’opportunité m’a été donné de participer à un parcours certifiant de formation en Ingénierie d’intervention du conseil d’entreprise, avec l’Institut Français pour le Développement du Conseil et de l’Entreprise (IDCE).
Après le poste de Conseiller d’entreprise intérimaire, j’ai créé mon cabinet dénommé « Solutions Entreprise » dès 2007, avant d’etre rappelé deux ans après par la Maison de l’Entreprise pour être titularisé comme Conseiller d’entreprise. Au fur et à mesure, ce poste m’a permis de me forger et de construire un profil de formateur propre à moi. Voilà pourquoi je présente toujours mon parcours professionnel comme étant assez atypique, dans le sens où j’ai d’abord été entrepreneur, avant de revenir être salarié et accompagnateur des entrepreneurs.
En 2011, je fus porté à la tête d’un nouveau service, en charge du Renforcement des capacités des entreprises. Ce service était à construire et j’ai pris de plaisir à monter toutes les pièces dudit service, tant sur le plan de la conception et de l’animation des modules de formation, que sur le plan de la promotion des formations.
La passion de contribuer à développer les compétences des entrepreneurs s’est amplifiée en moi, et je ne manque aucune occasion de m’y consacrer.
Aujourd’hui, je suis fier d’être un Maître Formateur certifié GERME par le Bureau International du Travail (BIT), Formateur certifié IFC–LPI–TPMA et Formateur de formateurs en compétences de vie. Il s’agit, pour moi, d’un processus qui me permet de capitaliser tout ce que j’ai appris et de les offrir à d’autres personnes.
Pour améliorer mon profil, je participe à des Masters en Gestion de projet et en Intelligence Economique et Développement International. Ce sont des sujets pour lesquels je suis fortement intéressé, que j’applique déjà, mais pour lesquels j’ai besoin d’un diplôme officiel.
GLC : Pourquoi était-il important pour vous d'obtenir la certification de formateur IFC-LPI TPMA ?
ITS : Obtenir la certification de Formateur IFC-LPI-TPME est très important pour moi, parce qu’il me permet d’appartenir à une famille de formateurs à l’international, d’acquérir de nouvelles compétences en matière de méthodologie de formation et surtout d’offrir mes services à des entrepreneurs aussi bien au Burkina Faso qu’à l’extérieur.
Cette certification me permet également d’être référencé dans la base des formateurs de IFC, GLC et d’autres partenaires. Ce qui m’ouvre certainement des portes pour des interventions à l’international. Cela correspond parfaitement à mes aspirations, car j’ai aujourd’hui besoin de relever d’autres défis plus importants hors du Burkina Faso.
GLC : Qu'est-ce qui fait de vous un bon formateur ?
ITS : Il est difficile de parler de soi-même. Mais, je peux me faire une idée de ce qui fait de moi un bon formateur, en me référant aux retours des participants à mes formations. Ce qui ressort très souvent de leurs appréciations peut être traduit par des qualités telles que :
- ma capacité d’adaptation ;
- mon sens d’écoute et mon empathie ;
- la poursuite de la perfection dont je fais montre ;
- mon envie de tout donner pendant une formation ;
- la construction méthodique de la formation avec les participants ;
- ma méthodologie participative, avec des méthodes et outils adaptés pour l’apprentissage des adultes.
J’estime que les adultes apprennent mieux quand ils appliquent eux-mêmes et quand ils découvrent eux-mêmes leurs points d’amélioration. J’arrive donc à animer mes formations avec cet esprit, de sorte à ce qu’ils aient eux-mêmes l’impression qu’ils sont leurs propres formateurs et qu’ils n’ont besoin de moi que pour facilitater.
GLC : D'après votre expérience de la formation au Burkina Faso et dans d'autres pays africains, quelles sont les compétences les plus demandées dans ces pays ?
ITS : De mon expérience, les compétences les plus demandées sont celles en lien avec le développement personnel, l’innovation, l’éducation financière, le développement des affaires à l’international, l’inclusion des jeunes et des femmes, le marketing des services, la gestion des structures d’appui aux entreprises innovantes (couveuses, incubateurs, pépinières, hôtels d’entreprises, etc.).
GLC : Citez quelques clients que vous avez coachés/formés. De quels engagements êtes-vous le plus fier ? Quel a été l'impact de votre participation sur les activités des clients ?
ITS : Pour les clients que j’ai formés et/ou coachés, je pourrais citer les plus récents, et particulièrement ceux qui m’ont marqué parce qu’ils m’ont permis de relever des défis. Il s’agit notamment des suivants :
- les impétrants du Programme de Certification au métier de consultant de la Maison de l’Entreprise du Burkina Faso. Ce programme m’a permis de développer et animer un nouveau module sur « l’ingénierie du conseil » ;
- les Coachs du Projet BRAVE Women financé par la Banque Islamique de Développement (BID). Grâce à ce projet, j’ai développé et animé un module de formation sur « le montage du Plan de Continuité d’Activités (PCA) » ;
- les consutlants inscrits à la Formation de Formateurs en gestion d’entreprise et méthodes de suivi selon la méthodologie GERME du BIT ;
- les professionnels de la santé du Master en Management des Structures de Santé de l’Ecole Burkinabè des Affaires (EBA) de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina Faso et de Toulouse Business School (TBS). Ce Master m’a permis de concevoir et animer un cours sur l’Accompagnement à la création, la reprise ou la succession d’entreprises du secteur santé. Les modules que j’ai développés sont : Esprit startup et émergence d’idée, Outils de pilotage de la startup, Rentabilité du projet et présentation devant les financeurs ;
- les opérateurs culturels privés et des agents publics du Ministère en charge de la culture. Cette mission m’a permis de développer et animer un module de formation sur les thèmes « Entrepreneuriat culturel : création et gestion d’entreprise » et « Techniques de recherche/mobilisation de financements publics et privés » ;
- les cadres et agents de l’Agence Nationale de Développement de l’Entrepreneuriat Congolais (ANADEC), au titre du cabinet de formation canadien SETYM International. Grâce à cette mission, j’ai développé et animé des modules sur « le management des PME » et « le Business Model » et un nouveau module sur « la gestion de l’incubateur ».
Les engagements dont je suis le plus fier sont ceux qui m’ont permis de monter de nouveaux modules et de les animer, surtout sur des thématiques sur lesquels je n’ai jamais été formés moi-même. Ce type de mission constitue pour moi des challenges que je prends du plaisir à relever. Ces défis ont jusque-là et surtout sur le développement des modules sur : le Plan de Continuité d’Activités, l’Ingénierie du Conseil, la Gestion de l’Incubateur, la Création et le pilotage d’une startup.
Mon métier de base qu’est Conseiller d’entreprise, me prédispose d’office à l’accompagnement et au coaching des entrepreneurs, surtout les jeunes. La plupart me revient pour des conseils et un coaching pour le développement de leurs affaires et de leurs compétences de vie, que ce soit de façon formelle ou non. Tout cela me permet aujourd’hui de recevoir des témoignages de jeunes qui me prennent en référence, dans leur métier de consultant formateur ou leur vie d’entrepreneur.
GLC : Parlez-nous du rôle que vous jouez à la Maison d'entreprise de Burkina Faso.
ITS : Au sein de la Maison de l’Entreprise du Burkina Faso, j’occupe le poste de Directeur du Marketing et de l’Appui Conseil. J’ai sous ma coupe trois services que sont : le Service Renforcement des Capacités des Entreprises, le Service de l’Appui Conseil et de l’Innovation aux Entreprises, le Service aux Membres.
L’objet de la Maison de l’Entreprise est de contribuer au développement du secteur privé et ma direction est au cœur de son métier, dans le sens où elle permet de faciliter l’accès des acteurs du secteur privé aux compétences entrepreneuriales et managériales, au marché et au financement.
Je suis aussi en charge du marketing de la Maison de l’Entreprise. Ce qui me permet, avec mes collaborateurs, de développer de nouveaux services d’appui conseil et de renforcement des capacités et de promouvoir les actions de l’institution auprès des acteurs du secteur privé.
En somme, je peux dire que mon rôle est suffisamment central au sein de la Maison de l’Entreprise du Burkina Faso.
GLC : Je parie que la formation n'est pas toujours une affaire sérieuse. Racontez-nous une situation où vous avez bien ri ou quelque chose qui vous a fait sourire.
ITS : Pour permettre à des adultes d’apprendre au mieux, il faut que la formation leur soit accessible, qu’ils apprennent en pratiquant et surtout qu’ils aient l’impression qu’ils s’amusent en apprenant. Dans leur environnement, tout est déjà tellement sérieux qu’il ne faudrait certainement pas en rajouter.
Une récente situation qui m’était assez bien cocasse fut l’appréhension de départ qu’avait l’un de mes participants à l’une de mes formations de formateurs. Il s’agissait d’un docteur en sciences de gestion et enseignant émérite qui me donnait l’impression qu’il n’avait pas grand-chose à apprendre et qui fut bien vite satisfait, parce que s’étant aperçu que l’andragogie et la pédagogie étaient bien différentes.
GLC : Citez trois faits sur le Burkina Faso que vous aimeriez que les gens du monde entier connaissent.
ITS : Le Burkina Faso est réputé pour être un pays avec une population chaleureuse et accueillante. Ce que j’aimerais faire découvrir au monde entier, c’est entre autres : sa résilience face à l’adversité, son ardeur au travail et la richesse de sa culture (parenté à plaisanterie, traditions, sites touristiques, etc.).
GLC : Quel est votre livre préféré ?
ITS : L’un des récents livres que je préfère est « La chèvre de ma mère » de l’écrivain congolais Ricardo Kaniama. Ce livre traite de la prospérité économique, à l’africaine !
GLC : Quels sont vos loisirs ? Y a-t-il des loisirs que vous aimeriez explorer ?
ITS : J’ai souvent et de plus en plus du mal à parler de mes loisirs, tant je suis arrivé à les assimiler « malheureusement » à mon travail. J’ai une grosse curiosité et j’aime découvrir pour m’en inspirer. Ce qui m’amène à sillonner Internet sur des sujets divers allant de la technologie à la cuisine, en passant par la culture des autres. J’aime beaucoup les voyages, mais n’arrive plus à en faire en dehors de mes missions de travail.
Les loisirs que j’aimerais explorer et/ou approfondir sont : les voyages, la danse et l’art culinaire.